Les films d’Alfred Hitchcock déclenchent la cinéphilie de De Palma lorsqu'il est étudiant. Rear Window (1954), Vertigo (1958) et Psycho (1960) semblent être les films dont il ne s'est jamais remis. Il les a étudié, analysé, s'en est inspiré pour ses propres films, conjuguant la grammaire hitchcockienne à tous les modes pour s'exprimer, et pour finalement créer son propre style…
De Palma n'est pas le seul à s'être inspiré d'Hitchcock, loin de là. Le meurtre de Marion Crane dans Psycho résonne encore dans la tête des cinéastes qui ont, tôt ou tard, fini par s’en inspirer pour le meilleur comme le pire. Ça a donné naissance à un nouveau genre de cinéma : le film de tueurs en série. John Carpenter choisira même la fille de Janet Leigh, Jamie Lee Curtis, pour lui aussi révolutionner le film d'épouvante avec Halloween (1978). De son côté, même si ce n’est pas intentionnel de sa part, De Palma permettra à Melanie Griffith, la fille de Tippi Hedren (The Birds, 1963, Marnie, 1964), de faire ses premiers pas au cinéma pour son dernier thriller en hommage au Maître, Body Double (1984).
Outre Carpenter avec des films tels qu'Assault on Precint 13 (1976), Fog (1980) ou même The Thing (1982), d'autres réalisateurs ont puisé dans l'univers hitchcockien, comme Henri-Georges Clouzot, René Clément, Akira Kurosawa, Gus Van Sant, William Wyler, Otto Preminger, François Truffaut, Stanley Donen, Claude Chabrol pour n’en citer quelques-uns en vrac. Certains s'en sont davantage inspiré pour créer leur univers particulier, à l’instar de Dario Argento (L'Oiseau au Plummage de Cristal, Profondo Rosso, Do You Like Hitchcock?) ou de Roman Polanski (Répulsion, Rosemary's Baby, Le Locataire, Frantic), entre milliers d’autres. Mais chez eux, c’est davantage l’atmosphère de ses films et certaines bases d’histoires qui les ont influencés. Tandis que les films de De Palma ont choqué les critiques en citant, de façon revendiquée, l’appartenance du réalisateur à l’univers Hitchcockien. Pourtant, loin de l'image du plagiaire tels que ses détracteurs le voient, Brian De Palma est parvenu à créer à partir de ses citations un style personnel et identifiable.
Même s’il dû subir les foudres de la critique, il ne changera pas son mode d'expression pour le bonheur de ses fans. « J’ai utilisé quelques-unes de ses histoires, repris quelques-uns de ses personnages. Ses idées étaient simplement les meilleures. Hitchcock reste pour moi l’artiste fondateur du genre. (Les Mille Yeux de Brian De Palma, interview par Luc Lagier) »
Une première référence au maître du suspens se trouve dans Greetings (1968), lorsqu'une fille prend un livre dans la bibliothèque d’un appartement, et feuillette le Hitchcock / Truffaut. L’année d’après, De Palma tourne Hi! Mom qui est plus ou moins une suite de Greetings, où Robert De Niro incarne un voyeur qui filme ses voisines. Mais c'est avec Sisters en 1973 que l’univers depalmien commence à rejoindre celui de son mentor, en appliquant une approche visuelle et narrative similaire. Le film reprend une base d’intrigue de suspense classique (une journaliste est témoin d'un meurtre dans l'immeuble en face du sien), et De Palma choisira pour la musique un compositeur légendaire ayant largement contribué avec Hitchcock : Bernard Herrmann. Les deux hommes se retrouveront sur Obsession (1975), film avatar entièrement dédié à Vertigo (dans lequel le spectateur attentif pourra également remarquer une référence à Rebecca), réalisé juste après Phantom of the Paradise (1974) dans lequel nous trouvons une parodie de la scène de la douche de Psycho.
Dressed to Kill (1980) est un autre hommage aux thrillers hitchcockiens et particulièrement à Psycho. Mais la critique commence à se lasser des références à gogo au cinéma d’Hitchcock. De Palma aussi. Il y met un point final avec Body Double en 1984, ultime hommage qui combine habilement Vertigo et Rear Window.